Le téléphone : un outil pour la défense des droits de l'homme ?
En RDC, le téléphone cellulaire est devenu un accessoire de nos vies. Chacun l’utilisant pour des fonctions diverses. Servant d’outil pour appeler, il sert aussi à prendre des photos, consulter la météo, jouer (pour les enfants) ou naviguer sur Internet. Des fonctions multitâches parmi lesquelles manquent pourtant un élément important : un instrument de défense devant la justice.
Dans le monde, de plus en plus de personnes utilisent leurs téléphones comme éléments de preuve, lorsqu’elles sont confrontées à des situations diverses.
Les vidéos tournées avec des téléphones ont par exemple, permis de mettre nu des injustices, comme les bavures policières contre les minorités, les actes racistes ou xénophobes ou des preuves de corruption.
Les réseaux sociaux sont inondés de vidéos amateurs, racontant un récit alternatif sur les injustices commises ou des faits de société que nous ne voyons pas dans les médias traditionnels. Ces vidéos ainsi diffusées, servent à des activistes comme moyens de pression, pour obtenir réparation des préjudices ou par les victimes elles-mêmes comme moyen de preuves en cas de poursuites.
Et en RDC ?
En Afrique, une vague similaire a existé, mais s’est vite emmêlée avec le courant des fakenews qui en ont décrédibilisé la portée. Des blogueurs avaient même remarqué que les gens, avaient développé la tendance de filmer des scènes dans lesquelles, d’autres personnes étaient en danger pour le buzz, en lieu et place de leur porter secours.
Nos services de sécurité ne sont pas photogéniques
Si des citoyens ont pris ce genre d’initiatives, elle n’est pas cependant la bienvenue dans certaines sphères. Lors de la grève des transporteurs à Kinshasa en avril 2018 qui protestaient contre les tracasseries routières, des éléments de la Police avaient été déployés à un arrêt de la Commune de Ngaliema, pour disperser des chauffeurs qui intimidaient ceux, n’ayant pas respecté le mot d’ordre de grève. Prenant des photos de la scène, j’ai failli me faire confisquer mon téléphone et être interpellé, au seul motif, que je filmais des agents de l’ordre.
Plusieurs années plus tôt, c’est au Rond Point Victoire, qu’un ami qui me prenait en photo devant la place des artistes, de se faire interpeller par des policiers qui se trouvaient derrière moi, au motif qu’ils ont été pris en photo et que cela constituait une « infraction ».
Les exemples de ce genre sont légions. La phobie des hommes en uniformes est telle, que l’on a soit même cultivé cette peur même quand nous nous rendons à l’étranger. Je ne me rappelle plus le nombre de fois où, au Rwanda, au Kenya, au Burundi ou au Mali, j’ai demandé si j’étais autorisé de prendre des photos de tel ou tel endroit.
Légaliser la pratique
Je pense que la liberté de la preuve, comme moyen légal pour se défendre en justice devrait être garantie à tout citoyen Congolais. Et cette garantie, devrait l’être par l’admission de cette part de preuve numérique fournie par la vidéo tournée à l’aide d’un téléphone portable.
Les nouvelles autorités devraient consacrer cette liberté comme fondamentale et garantir le droit, pour chaque citoyen qui se sentirait menacé ou lésé dans ses droits, de filmer ses interactions afin qu’elles constituent une preuve valable devant un tribunal ou un commissariat.
Dans le respect des libertés d’autrui, je pense qu’il serait également tant de légaliser le filmage des espaces publics par les gens à des fins personnelles, sans que quelqu’un de trop zélé, ne surgisse derrière vous pour demander si l’on est muni d’une autorisation de l’Hôtel de ville ou du ministère de la Culture, pour prendre des photos ou filmer des espaces et édifices publics.