Alors que la République Démocratique du Congo se positionne comme un acteur central dans la transition énergétique mondiale grâce à ses immenses réserves en cobalt, lithium et cuivre, un tournant historique s’annonce.

Le partenariat stratégique en gestation avec les États-Unis autour des chaînes de valeur des minéraux critiques, promet non seulement des investissements massifs, estimés à 500 milliards de dollars sur 15 ans, mais aussi une redéfinition des dynamiques industrielles et économiques avec des ramifications dans d’autres secteurs non-miniers comme le Numérique, les infrastructures, la Santé et d’autres domaines à fort potentiel de croissance.

Plus de 300 000 entreprises américaines, issues de divers secteurs, envisagent de s’implanter en Afrique selon l’Ambassadeur Troy Fitrell, Haut Fonctionnaire du Bureau Afrique du Département d’Etat s’exprimant lors d’une conférence de l’Atlantic Council à Washington sur les investissements hors mine, avec un intérêt croissant pour la RDC.

Cependant, cette opportunité soulève une interrogation fondamentale : la main-d’œuvre congolaise, est-elle prête à répondre aux exigences d’un tel partenariat ?

À ce jour, le constat demeure préoccupant. Le pays souffre d’un déficit structurel en profils techniques qualifiés, d’une faible représentation des femmes dans les filières industrielles, et d’un écosystème éducatif encore peu aligné avec les standards internationaux en matière de certification, de sécurité, de qualité et de performance.

Les attentes des entreprises américaines, particulièrement dans les secteurs miniers, technologiques et environnementaux, sont claires.
Elles portent sur des expertises de pointe telles que la robotique appliquée à la maintenance prédictive, la géomatique et la télédétection, l’intelligence artificielle industrielle, ou encore la cybersécurité opérationnelle.

À ces compétences techniques, s’ajoutent des exigences normatives : la conformité aux standards internationaux comme l’ESG (Environmental, Social, and Governance), OSHA (Occupational Safety and Health Administration), HSE (Health, Safety, and Environment), ISO (International Organization for Standardization), et HACCP pour n’en citer que quelques-uns.

Par ailleurs, ces entreprises recherchent également des qualités transversales essentielles, souvent négligées dans les systèmes de formation locaux comme la rigueur, la ponctualité, le respect des délais, le sens du reporting, l’éthique ; mais aussi la capacité à opérer dans un environnement bilingue (français-anglais), multiculturel et hautement normé. Des soft skills qui font cruellement défaut dans de nombreux secteurs comme dans les banques, où de nombreux Congolais se plaignent d’un service à la clientèle défaillant.

À défaut de répondre à ces critères, les postes à haute valeur ajoutée seront confiés à des expatriés, et une large part des processus de production pourrait être externalisée. Ce scénario réactiverait les frustrations sociales, tout en reproduisant les asymétries héritées des crises structurelles passées et nous priverait de l’opportunité de restructurer le tissu et l’élite industrielle détruit après les pillages de 1991 et 1993.

Face à cette urgence, une stratégie nationale s’impose. Elle devrait reposer sur quatre piliers :
Former des compétences adaptées au marché global ; Structurer les parcours en lien avec les réalités du terrain ; Certifier selon les normes internationales ; et féminiser les filières techniques. Un Plan National de Transition des Compétences pourrait ainsi être élaboré comme une feuille de route pour préparer le monde académique et professionnel à cette évolution à l’horizon 2030.
Soixante-cinq ans après l’accession à notre souveraineté politique, la souveraineté économique et industrielle demeurent à construire. La transformation des ressources passe désormais par la transformation des compétences.

RDC : les compétences locales à l’épreuve du partenariat RDC–USA